Des robots qui vous veulent du bien 1,2
J’aimerais vous parler de deux associations qui me tiennent particulièrement à cœur : La Quadrature du Net et Framasoft. Mais tout d’abord, un préambule s’impose...
Économiser son attention ; ne pas la gaspiller, l’allouer efficacement... Puis être écouté·e ; avoir sa place dans l’attention des autres... N’avez-vous pas ce genre de préoccupations ?
Dans cette économie de l’attention, sans surprise, l’accapareur veut y prendre une bonne place. Dans sa pire forme, il veut capter l’attention du plus grand nombre et l’exploiter à son profit, soit directement, soit en la revendant aux plus offrants.
Alors, vous, comment faites-vous pour capter l’attention ? Sans doute cela dépend-il de la personne à qui vous avez affaire... des circonstances... Et qu’en est-il de l’accapareur désireux de capter l’attention du plus grand nombre ? Étant dans la démesure, il rêve de bien connaitre chaque individu dans son état du moment et de pouvoir le cibler précisément.
Là, nous passons de l’économie de l’attention à celle de la surveillance. Dans ce jeu, aussi appelé « capitalisme de surveillance », l’acteur principal est « Big Tech » – souvent réduit à Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft, et donnant le fameux acronyme « GAFAM ».
Que ce soit les plus gros (états, banques, assurances, multinationales) ou des plus petits, que ce soit pour captiver, influencer, exploiter, catégoriser, surveiller, ou que ce soit juste pour avoir un peu d’attention, beaucoup sont prêts à payer. Évidemment, sans les tuyaux permettant de gaver les populations de toute sorte de contenus, à toute heure, en tout lieu, et sans les intelligences artificielles permettant de scruter, de synthétiser puis d’orienter les comportements, ce juteux business serait impossible. Ainsi, en plus de poser de graves questions éthiques, démocratiques et sanitaires, cette économie de la surveillance est un gouffre énergétique.
Mais au fait, pour capter l’attention, n’êtes-vous jamais tenté·e·s de donner dans la provocation, dans l’exagération ? De jouer sur les besoins, d’aiguiser les envies, ou de flatter les instincts ? Si vous avez des scrupules à utiliser ce genre de méthode, d’autres en ont beaucoup moins. Et les « meilleurs » à cet exercice se retrouvent naturellement au sommet de cette économie de la surveillance. Que leurs technologies livrent des minorités à la haine – parfois génocidaire, comme en Birmanie3 – ne les gênent pas. Si cela les gênait, d’autres accapareurs ayant moins de scrupule les auraient déjà supplantés.
Ce préambule étant fait, revenons-en à La Quadrature du Net et à Framasoft.
Dans le monde du numérique, les accapareurs rencontrent une difficulté particulière : les programmes et les données sont copiables et distribuables pour un coût marginal. Ils ont beau répéter ad nauseam « L’accaparement, c’est la liberté ; le partage, c’est le vol », toute une communauté a pu se développer pour donner vie à sa vision du numérique : un numérique du partage, collaboratif, véritablement au service de l’épanouissement des personnes. C’est la communauté des libristes. En France, elle est constituée d’une myriade de groupes5, dont deux sont mondialement reconnus :
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La Quadrature du Net est une association dont les buts sont « la défense des libertés sur Internet, l’évolution du droit d’auteur, et le maintien de la neutralité du réseau »6. Fondée en 2008, le dernier billet publié sur leur site « De nouveaux combats pour 2024 » résume bien tous les combats menés jusqu’ici, ainsi que leur détermination à les poursuivre.
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Framasoft est une association dont le but est de « promouvoir l’éducation populaire aux enjeux du numérique et des communs culturels »7. Via leur site, vous trouverez de nombreuses productions issues de la communauté libriste. À noter, leur dernière feuille de route triennale dont le titre illustre à merveille leur état d’esprit : « Collectivisons Internet, 3 ans pour voler dans les plumes du capitalisme de surveillance ».
Si vous ne les connaissez pas, je vous invite à les découvrir, en parcourant leur site ou plus simplement en lisant leur fiche Wikipédia. Peut-être alors aurez-vous envie de quitter le monde des GAFAM pour participer au mouvement libriste ? Et si tout cela vous semble vraiment trop compliqué, retenez juste une chose : ces collectifs vivent uniquement de dons, pas du trafic de données comportementales.